Dans le Monde du 24 novembre 2011, on pouvait lire en sous-titre d’un article consacré à la Conférence de Durban sur le climat que « des experts mettent en garde contre un emballement climatique ». Le 1 décembre, le sous-titre de l’article consacré au bilan météorologique de l’année écoulée affirmait «  Les treize années les plus chaudes jamais mesurées sont toutes postérieures à 1996. Celle qui s’achève se classe au dixième rang, malgré l’effet d’une forte Niña. » Le réchauffement climatique s’accélère-t-il en même temps que la concentration de CO2 dans l’atmosphère ne cesse de s’accroître ? Ce n’est pas certain du tout. Mais c’est bien ce que voudraient nous faire croire les deux journalistes du Monde, quitte à interpréter les données de manière plutôt tendancieuses, données qu’ils fournissent eux-mêmes. Ce journal est du côté des « réchauffistes » comme la plupart de ses confrères. Se contentent-ils tous de répéter sans esprit critique le prêt-à-penser que leur livrent les Gourous du GIEC ou de l’OMM ou sont-ils réellement convaincus ? Ou bien encore trop sensibles à l’argument d’autorité : les experts sont experts en la matière dont-ils sont les experts ! N’est-ce pas ? Mais pourquoi donc est-il si iconoclaste de douter alors que les données sont ambigües et leur interprétation sujet à controverse ?


Des Cassandres peu écoutées…

Les sommets sur le Climat se suivent et se ressemblent dans leur incapacité notoire à prendre des décisions concrètes et contraignantes pour « limiter les gaz à effet de serre ». Même les pays qui s’y sont engagés n’ont pas atteint leurs objectifs. Bref, les Terriens continuent de rejeter dans l’atmosphère du CO2. C’est le cas de tous les pays, mais plus encore des pays développés et de ceux qui cherchent à les rattraper à marche forcée. Selon l’OMM, la concentration de CO2 dans l’atmosphère a augmenté de 2,3 ppm (partie par million) en 2010 atteignant la concentration record de 389 ppm. Dans tous les scénarios concoctés par les experts de l’AIEA publiés le 9 novembre 2011 ou du PNUE publié le 23 novembre 2011, la courbe de ces rejets est linéaire et présente une pente ascendante plus ou moins accusée selon que la tendance actuelle se poursuit ou que l’on réussit à la freiner. Ils prédisent un emballement climatique irréversible, catastrophique et dangereux pour le XXIe siècle. Plus alarmistes que jamais, ils assurent qu’il ne reste que quelques années – 5 ans – pour agir, après il sera trop tard.

… d’autant plus alarmistes que leurs boules de cristal se brouillent !

L’alarmisme des experts semble directement proportionnel aux difficultés que rencontrent leurs postulats de base. Ne parlons même pas de ceux qui contestent la notion de réchauffement global. On supposera qu’elle a un sens, au moins pour les besoins de la discussion. La concentration en CO2 continuant de croître, le réchauffement climatique devrait faire que chaque année soit plus chaude que la précédente pour que la courbe conserve une allure semblable à celle qu’elle avait dans la décennie 1980 – 1990 et 1990 – 2000. Nous savons déjà que cela n’est pas le cas que la courbe semble avoir atteint un plateau et que le réchauffement est en panne depuis près de 10 ans maintenant. En tout cas, l’année 2011 n’est qu’à la dixième place des années les plus chaudes jamais mesurées. La dixième alors qu’elle devrait être la première !

Heureusement l’OMM a trouvé l’explication : c’est la faute à la Niña. Et Le Monde se fend d’un beau graphique montrant l’évolution de températures moyennes depuis 1950 qu’il titre « 2011, l’année à Niña la plus chaude ». Et voilà, 2011 n’est pas l’année la plus chaude, c’est l’année à Niña la plus chaude ! Il fallait y penser… D’autant que si le journaliste rappelle que 2010 est l’année la plus chaude à avoir été mesurée, il oublie de dire que 2010 fut une année à Niño (il produit des effets inverses à la Niña) et que 2010 n’a dépassé que de très peu 1998 qui fut particulièrement chaude. Le graphique du Monde montre de façon criante la fameuse « pause » sous la forme d’un plateau après 1998. C’est cette « pause » dans le réchauffement qui met à mal les prédictions du GIEC et des experts associés. Mais évidemment, le journaliste n’y fait même pas allusion. Dans le déni de réalité lorsque cette réalité est dérangeante, la seule presse qui réussit à faire un peu mieux – mais guère, ce sont les journaux et magazines des collectivités territoriales, Conseils généraux, régions, communes, communautés diverses et variées.

De toute façon, parole de climatologue, il faut raisonner en tendance. Selon l’OMM, citée, Ô ironie, dans l’article du Monde du 1 décembre : « La température moyenne de la décennie 2002 – 2011, supérieure à la normale de 0, 46°C, est la plus élevée jamais constatée pour une période de dix ans, à égalité avec la décennie 2001 – 2010 » (souligné par moi, JFD) En d’autre termes, sur ces deux décennies en cause la température n’a pas augmentée. Faudra-t-il attendre encore dix ans avant de reconnaître qu’il y a un problème de corrélation entre l’augmentation de la concentration de C02 dans l’atmosphère et l’évolution de la température moyenne du globe ? Cela est très gênant puisque dans cinq ans au plus tard, il faut avoir pris des mesures drastiques selon les Cassandres du GIEC ! Pour l’instant, il semble que la pause dans le réchauffement perdure et cela est en contradiction avec les prédictions catastrophiques du GIEC et remet en question la cause qu’il attribue au réchauffement climatique, l’augmentation de la concentration de CO2 anthropique dans l’atmosphère. Depuis onze ans la température moyenne a cessé de croître alors que les émissions anthropiques de C02 n’ont pas cessé d’augmenter. Mais il n’y a pas pire sourd que celui qui ne veut pas entendre ! Pourquoi ne porte-t-on pas honnêtement sur la place publique la question de savoir d’où provient ce manque de corrélation ? Pourquoi ne pas vouloir envisager que, peut-être, les émissions anthropiques de C02 ne jouent qu’à la marge des changements climatiques en cours ?

Quelles sont donc les raisons de ce surprenant déni de réalité ?

On peut en énoncer trois assez triviales : la première est que les climatologues ont trop joué les gourous pour se dédire ou seulement admettre en public le doute sur leurs prédictions, des prédictions à un siècle ! Les Gourous et les voyantes ne se trompent pas et ne changent pas d’avis. Les experts non plus d’ailleurs. L’ennui, c’est que les avis de ces derniers diffèrent souvent.
La seconde, c’est que l’AIEA dans le monde, le CEA, AREVA, EDF, etc. en France ont saisi cette théorie du réchauffement climatique d’origine anthropique comme argument de promotion de l’énergie d’origine nucléaire, de l’électricité soit disant « décarbonée », une innovation linguistique et un gros mensonge de leurs services de communication. Car s’il est vrai qu’une centrale nucléaire, une fois construite et approvisionnée en uranium, ne produit pas de CO2, cela cesse d’être vrai si l’on considère, comme on doit le faire, l’ensemble du process de l’extraction du minerai, son raffinement, son transport depuis l’Afrique ou le Canada, la construction de l’usine, des chaudières jusqu’au démantèlement des installations en fin de vie, démantèlement que l’on ne sait d’ailleurs pas faire… La nucléocratie française dont la puissance de lobbying politique est inégalée et dont les positions sont stratégiques dans les instances de la Recherche scientifique ou médicale française a instrumentalisé cette théorie du réchauffement climatique d’origine anthropique pour promouvoir le nucléaire. En France, cela a bien fonctionné et l’on a vu le président de la République, le VRP du nucléaire français à l’étranger, défendre de façon véhémente la réduction des émissions de gaz à effet de serre. Il n’était pas devenu écologiste pour autant… Non, il voulait vendre ses chaudrons de l’enfer à l’étranger. Dans le monde, grâce à l’AIEA, la promotion du nucléaire pour lutter contre l’effet de serre commençait à porter ses fruits et on assistait naguère à un réveil de cette industrie mortifère, réveil que l’accident de Fukushima a stoppé net.
En France, ces deux raisons de l’intangibilité du dogme du réchauffement climatique causé par les émissions de CO2 d’origine anthropique se cumulent.
Les Gourous français de la climatologie, Jean Jouzel, Valérie Masson-Delmotte travaillent directement ou indirectement dans des Instituts ou organismes de recherche liés au CEA. L’ancienne directrice d’Areva conseillait aux écologistes qui s’opposaient au transport de déchets radioactifs de s’occuper plutôt du réchauffement climatique. De même d’ailleurs et à l’inverse, les sceptiques aux USA ont leurs travaux sponsorisés ou financés par l’industrie pétrolière. Il ne s’agit pas, comme on le fait trop souvent, de dire que ces chercheurs sont vendus mais de constater que si leurs programmes de recherche et les résultats éventuels attendus étaient nuisibles à l’industrie qui les finance, celle-ci cesserait de le faire.
La troisième raison est l’adhésion non critique de beaucoup d’écologistes, au moins en France, à cette théorie de l’origine anthropique du réchauffement climatique. Ils y trouvent un argument de poids en faveur des changements dans les modes de vivre, de consommer et de se déplacer qu’ils promeuvent depuis toujours avec la recherche des économies d’énergie, la substitution des énergies renouvelables dites « douces » au charbon et au pétrole polluants dont les stocks sont limités, mais avec le risque de se trouver aussi en porte-à-faux dans leur rejet d’un nucléaire qui a réussi à se faire passer comme une énergie « décarbonée », cette énergie qui avait séduit un temps Nicolas Hulot et son équipe.
Ces écologistes attaquent les méchants pétroliers qui sponsorisent les recherches des « climato-sceptiques » mais cela ne les gênent pas d’avoir des alliés comme le CEA et Areva pour pourfendre ce « climato-scepticisme » défendu aussi par des chercheurs de renom, comme Marcel Leroux, malheureusement décédé en 2008. C’était pourtant un chercheur que les écologistes « réchauffistes » fanatiques auraient été bien inspirés d’écouter. Il leur aurait peut-être ouvert l’esprit et instillé une dose salutaire d’esprit critique. D’autant que ce chercheur avait un profil qui aurait dû leur plaire. Indépendant par rapport à tous les lobbies, il était professeur émérite de climatologie à l'Université Jean-Moulin de Lyon et directeur du Laboratoire de climatologie de cette université. Mais malheureusement, Marcel Leroux était bien moins médiatique et médiatisé que Jean Jouzel. Ses études sur les anticyclones mobiles polaires sont bien moins vulgarisables et moins people que la théorie de «  l’effet de serre » que tout le monde croit comprendre. En plus, elles ne permettent pas d’affirmer que le ciel nous tombera (ou ne nous tombera pas) demain sur la tête si nous ne changeons pas de conduite et n’adoptons pas des modes de produire, de consommer et de se déplacer plus respectueux de l’environnement, de la nature, des limites de sa capacité à se régénérer et des limites de la planète. Elles ne permettent pas non plus de vilipender l’incurie des gouvernements en place et de se poser face à eux en sauveurs de l’humanité pour convaincre les électeurs et obtenir leurs voix. Bref, la théorie du réchauffement climatique causée par des émissions anthropiques de gaz à effet de serre fait bien leur affaire comme elle fait bien aussi celle des nucléocrates. Le plus curieux c’est que personne parmi ces écologistes ne trouve bizarre cette alliance de fait avec les chercheurs du CEA et les propagandistes d’Areva. Elle est pourtant fondamentalement contre-nature car l’industrie nucléaire civile n’est pas une menace hypothétique dans un avenir mal défini, c’est une menace actuelle et bien réelle contre la vie et ses conditions même de perpétuation. Il y a donc, peut-être, une quatrième raison plus profonde que des raisons de boutique qui fait que cette théorie séduit tant de monde.

Le nouveau visage de Prométhée

Pour la mettre en lumière, nous allons supposer – je dis bien supposer – que les variations climatiques du siècle dernier et du début de ce siècle sont indépendantes des activités humaines. Supposons qu’elles aient des causes cosmiques. Dans ce cas que pourrions faire d’autre que de les subir et tenter de nous y adapter comme tenteront de le faire tous les autres êtres vivants quelle que soit leurs causes ? Combien présomptueux se révélerait l’objectif des sommets mondiaux d’agir sur ces changements et de « réorienter la machine climatique » ! Présomptueux également les objectifs des « agendas 21 » et autres « plans climat » de « lutter contre le changement climatique »… Nous ne pourrions rien faire, ne rien changer au cours des événements. Dans une telle perspective nous serions renvoyés à notre impuissance de minuscules parasites d’une petite boule ne tournant pas très rond dans l’infini de l’Univers. Du point de vue de Sirius que cette hypothèse nous forcerait à adopter, nous ne sommes guère plus importants que les insectes écrasés sur le pare-brise d’une automobile par une chaude soirée de printemps. La Terre se débarrasse de notre espèce prédatrice de ses richesses d’un haussement d’épaule, pardon de température, indifférent comme nous écrasons d’une tape négligente le moustique qui nous importune.
Il faut reconnaître que la plupart d’entre nous manquent trop d’humilité pour accepter une telle image, sinon d’eux-mêmes, du moins de leur espèce. Cette hypothèse froisse l’arrogance prométhéenne de la civilisation occidentale tandis que l’hypothèse d’un changement climatique provoqué par les activités humaines est en parfaite harmonie avec cette arrogance et la flatte. Nous, nos activités, notre industrie, notre technologie ont été assez puissants pour entrainer des modifications globales à l’échelle de la Planète entière dont nous devenons responsables. Nos activités, notre industrie, notre technologie, notre inventivité nous permet de réorienter la machine climatique pour contenir le réchauffement dans les limites que nous avons décidées. En tout cas nous en sommes capables et si nous ne le faisons pas, ce sera parce que nous ne l’aurons pas voulu. Nous pouvons le faire et continuer de produire et de nous reproduire sans limite parce que nous serons assez astucieux pour ne compromettre de façon irrémédiable (pour nous et nous seuls, les hommes) ni les équilibres vitaux, ni un environnement que nous savons déjà restaurer ; parce que nous sommes maîtres et possesseurs d’une Nature que nous modifions selon nos goûts et nos humeurs : c’est le développement durable. Et le développement durable n’est en fin de compte rien d’autre que le rêve (ou le cauchemar) d’une croissance infinie et d’une appropriation totale en vue d’une exploitation intelligente d’une planète réduite à n’être que notre jardin, celui de l’homo sapiens sapiens triomphant à tout jamais.
Telle serait la raison profonde du refus de discuter la thèse « majoritaire » sur l’évolution du climat : l’arrogance prométhéenne de l’homme occidental qui revêt ici une figure assez inattendue.

De même que le productivisme était au siècle dernier l’horizon indépassable des idéologies de droite et de gauche, ce développement durable est devenu l’idéologie indépassable de tous les acteurs ayant un pignon, petit ou grand, sur la scène politique. Face à aux forces qu’ils incarnent, il faut construire une autre écologie non prométhéenne, radicale, une écologie qui n’est qu’un retour à l’une de ses formes que le développement des écologies superficielles, réformistes et environnementalistes ont étouffée ; une écologie qui prend le parti de la nature sur la culture, du sauvage sur le civilisé pour sauver la culture et ses civilisations. Les chemins pour y parvenir sont multiples. L’un d’entre eux, mais ce n’est pas le seul, est de pousser l’écologie superficielle jusqu’à ses extrêmes limites pour les mettre en évidence et être à même de les surmonter.
Dans la pratique, les mesures que les «agendas 21» ou les «plans climat» préconisent sont des mesures qui, à l’exception de celles qui promouvraient le nucléaire, doivent être mises en œuvre de toute façon pour de multiples autres raisons que la « réorientation de la machine climatique », la première de ces raisons étant l’épuisement inéluctable des stocks d’énergie fossile ou minérale. Cette raison-là est impérative, reconnue non seulement par l’ensemble de la galaxie écologiste mais aussi par les constructeurs automobiles qui cherchent fébrilement de nouvelles motorisations qui soient aussi souples, pratiques et puissantes que le moteur thermique à essence ou bien encore par les émirats arabes qui anticipent l’épuisement de leurs gisements pétroliers. L’urgence est bien de passer d’une « énergie de stock » à une « énergie de flux », cette dernière expression étant préférable à celles d’ «énergie douce » ou d’énergie « renouvelable » qui véhiculent des connotations pour le moins trompeuses et dangereuses. En effet, si ces formes d’énergie sont douces et renouvelables, il n’y aura plus de raison de se priver. Dans l’apologie non critique des énergies renouvelables, qui du coup deviennent inépuisables, se cachent trop souvent la démesure et l’arrogance de la civilisation occidentale, son appétit insatiable de cette énergie sur laquelle elle repose, son incapacité à se fixer à elle-même des limites. La hauteur démesurée des mats des nouvelles éoliennes alignées à perte de vue le long d’une autoroute en est, tout à la fois, l’évident symbole et l’hideuse concrétisation.
Et c’est bien là en effet que se trouve le nouveau point de clivage entre les écologistes, en tout cas les écologistes radicaux et les thuriféraires du développement durable : la nécessité physique et morale d’une société de sobriété et notamment de sobriété énergétique, d’une société du « suffisant » et de l’autolimitation des « besoins ».

Dimanche 8 Janvier 2012 Commentaires (2)
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